Journal d'Infos et Culture Libertaire,

se veut dans la continuité des fanzines, de la scène alternative et du cinéma indépendant autogéré. Il est dans la mouvance anartiste et anarcho-surréaliste.

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THEATRE:

Reprise des Crabes de Roland DUBILLARD

 

Mise en scène de Frank HOFFMANN
Avec Denis Lavant, Maria Machado, Samuel Mercer & Nèle Lavant
Scénographie Christoph Rasche
Visuels & Costumes Maya Mercer
Lumières Daniel Sestak
Musique René Nuss
Dramaturgie Charlotte Escamez / Florian Hirsch
Ingénieur son Guillaume Tiger
Montage vidéo Jean Ridereau
Assistante mise en scène Eugénie Divry

Je fais partie de ceux ou celles qui attendent du théâtre une sorte d’électrochoc. Mais cela se passe très rarement, peut-être heureusement d’ailleurs.
Ah cette envie d’être transportée dans un ailleurs qui ne soit pas aseptisé comme celui des publicités ou des échanges sur les réseaux sociaux !

Non, la pièce Les crabes que j’ai vue à Avignon en 2023 n’a pas été un électrochoc. Mais je m’en souviens parce qu’elle m’a dérangée comme une sorte de cauchemar que je n’aurai pas osé décliner moi-même. Car la langue de Dubillard est méchante. Elle parle du mal qui se cramponne à l’humain et de sa bêtise également.

Au secours ! criera une partie du public. Heureusement les personnages « affreux » sont interprétés par des artistes fort sympathiques. C’est du théâtre, zut, à ne pas confondre avec la réalité à moins que cette dernière soit pire hélas.

Voici donc ci-dessous ce que j’avais écrit après la création du spectacle à Avignon :

La pièce Les Crabes de Roland DUBILLARD date de 1971 et vient de faire l’objet d’une création au Théâtre du Chêne noir au festival off d’Avignon pour célébrer le centenaire de la naissance de l’auteur.
On pourrait parler d’une parodie de l’existence ou de la condition humaine. Que l’on aime ou pas les crabes au propre ou au figuré, il est difficile de ne pas être impressionné par l’inquiétante atmosphère qui règne dans cette pièce dont tous les protagonistes sont roulés dans la farine langagière de l’auteur dont voici quelques perles :
« Une bouche avec un peu de bonne volonté pourrait se manger toute seule »
« Qu’est-ce que la gorge d’un rossignol, un peu de soudure et silence ! »
« Il trainait les moustiques dans son regard comme une grande tour Eiffel inutile. »

Le synopsis plutôt simple oppose un jeune couple paumé à un vieux couple excentrique dans une villa de bord de mer appelée Le Crabe, Il semblerait que tout fuit dans cette résidence : la baignoire, les crabes et la raison. Les jeunes mangent à longueur de journée ces fameux crabes et le plombier est attendu comme le messie.
Dubillard parle de cauchemar comique. On assiste à un joyeux maelstrom d’idées mal digérées : mal de mer, mal de crabes. Il y a de la défonce dans l’air, celle de la verve « apocalyptique » de Dubillard qui tourne en dérision les tentatives infructueuses des pauvres humains de claquer la porte à la mort. Et que penser de l’affreux jojo, un abruti de première classe qui mitraille sa propre épouse ? L’homme vidé de sa substance donc de son esprit tuerait simplement par réflexe ?
Mais pourquoi donc faire entrer une mitraillette dans une pièce de théâtre ? Parce que cela fait partie hélas des accessoires de l’inventaire humanoïde.

Dubillard en cuisinier théâtral offre au public une soupe fumante de crabes qui brûle la langue.

Les interprètes de cette symphonie cauchemardesque sont excellents : Samuel MERCER en jeune homme qui ne se réveillera jamais du cauchemar, Denis LAVANT qui y baigne comme un poisson dans l’eau, Marie MACHADO en matrone un brin mélancolique et Nèle LAVANT avec sa fraicheur et sa jolie voix haut perchée.
La mise en scène fort bien lestée de Frank HOFFMANN électrise l’ambiance à souhait.

Voilà du théâtre pour rire méchamment de soi-même ou des autres. Ensuite, n’allez pas vous jeter sur une assiette de crabes !

Article mis à jour le 9 avril 2024
Evelyne Trân

A LA SCALA 13 Bd de Strasbourg 75010 PARIS
du 14 avril au 26 mai 2024 à 17h30 ou 21h30.

 

Livres:

Révolutionnaire sans texte

 

La collection Le peuple du livre publiée par les éditions L’Échappée, après s’être penchée sur Le Jeune Ragon (par Thierry Maricourt) et la collection Little blue book (par Goulven Le Brech), propose un nouvel ouvrage sur les livres-gravures de Franz Masereel intitulé Histoires sans parole. Rédigé par Samuel Dégardin l’un des meilleurs spécialistes de l’artiste, dessinateur et écrivain – il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur son œuvre – propose une analyse fouillée autour de ce moment particulier dans son œuvre, ses livres sans paroles
Franz Masereel est né en 1889 dans la bourgeoisie belge. Formé intellectuellement par son beau-père, proche des milieux libres penseurs, il suit les cours de l’école de dessin. C’est au début des années 1910 qu’il rencontre les groupes libertaires à Paris. Au contact des artistes bohèmes parisiens, il se familiarise avec le style de la gravure sur bois dont il devient vite un des meilleurs pratiquants.

 

Lors de la Première Guerre mondiale, se réfugie en Suisse, où il rencontre Stéphan Zweig et Romain Rolland. Il utilise ses talents artistiques pour dénoncer la guerre comme en témoigne ses descriptions du conflit dans Demain ou Les Tablettes.
Après la guerre qu’il atteint son apogée à la fois stylistique et créatrice, publiant en quelques années plusieurs récits baptisés
Histoires sans paroles. Ces livres sont le centre de l’ouvrage, l’auteur analyse chacun des textes.
Masereel est passionné par la question sociale,
Les 25 images de la passion d’un homme, illustre la vie et les luttes du syndicaliste libertaire de la Loire Clovis Andrieux. Lui succède, Mon livre d’heures, qui décrit sa perception de la vie mélange d’hédonisme et de passion pour la justice. Le Soleil peut être pris comme une allégorie des espoirs de la fin de la guerre et de la grande lueur à l’est. En effet, Masereel se rallie au bolchevisme. Il publie ensuite plusieurs récits graphiques comme Histoire sans paroles et Idée décrivant les métamorphoses de la société des années ou La Ville qui illustre les transformations des cités. Dès le début des années vingt, il devient compagnon de route accompagnant la propagande soviétique, comme en témoigne Du noir au blanc. Il continue à dessiner et prolonge son action militante après la guerre jusqu’à sa mort en 1972 comme l’explique l’auteur. Samuel Dégardin accompagne son propos de nombreuses analyses sur la fabrication des estampes, la diffusion des livres. Il analyse aussi les postérités de Masereel. Plusieurs artistes libertaires comme Hélios Gomez utilisent des gravures sans paroles pour montrer les transformations sociales dans l’Espagne révolutionnaire. Plusieurs de ses épigones se retrouvent également dans les dessins de propagande de la mouvance communiste.
Un beau livre pour sa qualité graphique, la mise en page soignée et la précision du propos.

Sylvain Boulouque


Histoires sans paroles
Samuel Dégardin
L’échappée 2024 316 p. 24 €

 

Attention aux apparences !!

 

« Le Grand Paris Express est un projet en cours de construction d’un nouveau réseau de transport en commun autour de Paris. D’ici 2030, après une vingtaine d’années de travaux, quatre nouvelles lignes automatiques entoureront la capitale en traversant la petite couronne. Dans le même temps, les lignes 11 et 14, déjà existantes, seront étendues. Ainsi aux quatorze lignes bien connues des voyageurs franciliens s’ajouteront la 15, la 16, la 17 et la 18 qui permettront des interconnexions entre villes de banlieue et pôles d’activité, sans passage obligé par la ville-centre. » Cette description donne un sentiment de gigantisme qu’il faut relier aux travaux pour les Jeux olympiques. Anne Clerval et Laura Wojcik, dans leur livre Les Naufragés du Grand Paris Express, publié aux éditions Zones, déchirent le voile de ces apparences. En effet, « Au-delà des nouvelles lignes de métro, on a là un vaste projet urbain de restructuration du cœur de l’agglomération, avec la construction de nouveaux quartiers de gare et la volonté de faire émerger une gouvernance à l’échelle métropolitaine par le biais de la Métropole du Grand Paris (MGP). Les enjeux dépassent largement les déplacements quotidiens des Franciliens. Il s’agit d’affronter la concurrence internationale des métropoles globales et d’abord celle de Londres. »

 

Nous assistons à la disparition du ghetto réel ou supposé par la démolition des logements sociaux et la question posée reste celle de savoir où sont logés les déplacés ou expulsés. De plus, les activités économiques sont exurbanisées en créant une métropole polycentrique, sans oublier l’émergence d’une gouvernance métropolitaine dans un contexte néolibéral. Pour qui réside en région parisienne, les témoignages repris dans le livre et les constructions, les travaux incessants tels que décrits font écho au quotidien des franciliens. Le livre entend proposer des clés de compréhension de ce projet complexe et peu approprié par ses habitants. Comment s’y retrouver ? Les courriers de la Société des grands projets reliés par la SEGAT, société privée opérateur foncier mandatée le Grand Paris jettent la confusion dans les esprits. Les petits pavillons ne sont pas détenus par des gens fortunés, les habitants des logements sociaux connaissent les pressions, le harcèlement, le préjudice moral de quitter le logement où l’on a toujours vécu et où l’on pensait finir sa vie. La dimension humaine est ignorée par les pouvoirs publics dont le souhait est d’annihiler la banlieue.

La mixité sociale, une sinistre plaisanterie
Les autrices expliquent très clairement le dispositif institutionnel qui débute avec une approche souple initiée par Bertrand Delanoë, alors maire de Paris. Puis Sarkozy prend la main brutalement, suivi par Hollande, une culture du consensus politique, élus locaux et pouvoirs publics considèrent y trouver leurs comptes. Rares sont les maires imposant une part de logements sociaux. On ne règle pas les problèmes sociaux, on s’en débarrasse. La gentrification de la première couronne de la région parisienne est une réalité, la grande couronne prend le même chemin. Les réseaux de transport se développent ? Construisons autour des gares 78 nouveaux quartiers en les confiant à de promoteurs privés qui achètent à bas prix pour concentrer une nouvelle population. La pauvreté est ignorée, les écarts se creusent, le coût du logement explose. La destruction des logements sociaux est aussi très bien traduite par les exemples d’Aulnay-sous-Bois, Romainville, Aubervilliers, Issy-les-Moulineaux, Villiers-sur-Marne. La montée en gamme touche même les mairies communistes. L’analyse des politiques d’urbanisation est très intéressante. La mixité sociale est une sinistre plaisanterie. Nous voyons les effets : on rejette les pauvres de plus en plus loin. La connexion entre les intérêts publics et privés implique un changement de population et le Grand Paris en est le vecteur.

Aucun projet politique progressiste
Aujourd’hui, il n’y a plus de projet politique progressiste pour la région d’Ile-de-France. Pourtant, la gauche a toujours été porteuse de perspectives innovantes. Dans la première moitié du vingtième siècle, Henri Sellier, maire socialiste de Suresnes, président du conseil général de la Seine, promeut les cités-jardins qui font l’objet de destructions systématiques par les maires de droite aujourd’hui. Les autrices font aussi référence au livre d’Henri Lefebvre, Le Droit à la ville, un ouvrage à relire. Il peut inspirer les initiatives locales, la socialisation des luttes. Elles insistent aussi sur une démarche autogestionnaire. Clairement, ce livre est outil d’analyse et de réflexion pour mener les luttes urbaines. A mettre en lien avec le livre de Jade Lindgaard, Paris 2024, une ville face à la violence olympique Ed. Divergences, 2023 (Site du Monde libertaire, Chronique du temps réel du 17 mars 2024)

Laissons-leur la parole : « Insistons sur le fait que les questions urbaines qui se posent aujourd’hui, comme le manque de logements, la distorsion entre les lieux de travail et les lieux de vie, l’inadaptation des emplois aux possibilités des habitants, sont liées aux apories de la ville capitaliste et que prétendre les régler sans remettre en cause les fondements de ce système est vain. […] Le droit à la ville ne porte pas tant sur la façon d’aménager la ville […] que sur son organisation politique même, sur un mode de production de l’espace réellement approprié par ses habitants. »

• Anne Clerval, Laura Wojcik
Les naufragés du Grand Paris Express
Ed. Zones, 2024

 

 

 

Une hécatombe oubliée dans l’Océan Pacifique

 

Le choc de la rencontre entre les conquérants européens conduit par Magellan, Cook, de Bougainville et les peuples océaniens ne fut pas que culturel et économique. Il se traduisit par une hécatombe. D’environ 3 millions d’habitants, la population se réduisit à quelques 400 000 individus avec des îles quasiment désertifiées comme Rapa Nui, la célèbre Ile de Pâques (10 000 habitants en 1720, une petite centaine en 1880). Et ce n’est pas que la responsabilité de la France mais bien de tout un continent qui déverse, du XVIe au début du XXe siècle, maladies, turpitudes, méfaits, esclavages, destructions de grandes cultures.

 

Archéologue installé en Nouvelle-Calédonie, Christophe Sand s’appuie sur ses constats de concentrations d’habitat et de lieux de cultes pour s’interroger sur le nombre d’habitants dans ces îles. Il lit de nombreux témoignages d’envahisseurs (les trois M, les militaires, les missionnaires, les marchands). Et nous propose son livre Hécatombe océanienne, Histoire de la dépopulation du Pacifique et ses conséquences ( XVIe -XXe siècle), publié aux éditions Au vent des Îles en 2024. Insistons sur cette maison d’édition. Je cite leur présentation. « Fondée en 1990 à Tahiti en Polynésie française, Au vent des îles publie des auteurs du grand Pacifique et des ouvrages relatifs à l’Océanie. Région vaste et lointaine, méconnue quand elle n’est pas simplement fantasmée. Nos auteurs, résolument ancrés sur leur île mais façonnés par une histoire commune, imprègnent leurs écrits d’une ambition partagée : donner à lire l’Océanie autrement. » Leur catalogue est d’une grande richesse et d’une belle diversité. A découvrir !!

Des sociétés saccagées par les explorateurs
Revenons-en à cette hécatombe. Qui en a fait l’histoire ? Personne. Les témoins occidentaux se sont contentés de mettre en cause les mœurs des habitants avec toujours le mépris du dominant. Dans son livre, Christophe Sand nous invite à découvrir les différentes îles de la Mélanésie, de la Microsénie, de la Polynésie, tout comme les différentes sociétés. Je vous renvoie à un livre commenté récemment dans la chronique Des Idées et des Luttes du 2 mars 2024, Collectif, direction de Pierre Singaravélou, Colonisations. Notre histoire, Ed. du Seuil, 2023. Les deux se complètent et donc s’enrichissent. Les populations sont nombreuses au moment des découvertes, l’Océan Pacifique recouvre un tiers de la surface de la Terre. On remonte sur des milliers d’années pour couvrir des milliers de kilomètres de voies de commerce. La vie et les échanges n’ont pas commencé avec les explorateurs européens. Le livre se construit autour de huit chapitres, le premier couvre la longue période d’exploration de l’Océanie par les pays européens et les conditions sanitaires sur les bateaux. Un deuxième chapitre aborde les grandes pandémies historiques et détaille les maladies introduites par les européens (tuberculose, MST diverses, variole, scorbut). Les conséquences sur des habitants non immunisés sont effroyables. Certes, il existe des maladies endémiques comme la goutte et l’éléphantiasis mais ces nouvelles maladies sont radicales comme sur les peuples d’Amérique. Très tôt les indigènes sont conscients des maladies introduites par les marins et les animaux importés. En cinq chapitres, Christophe Sand développe son analyse sur les différentes îles pour expliquer chiffres et tableaux à l’appui, la chute des populations. Certaines îles sont touchées à 95 %. Et cela se poursuivra jusqu’au milieu du XXe siècle. Un chapitre final propose « une synthèse finale chiffrée des données dans une approche régionale permettant de discuter l’impact de cet effondrement sur les organisations sociales, symboliques et politiques des populations insulaires ».

« Le traumatisme historique transgénérationnel »
Expliquer cette hécatombe par les maladies serait insuffisant, presque une fuite pour évacuer la responsabilité des européens colonisateurs. Des razzias, des destructions d’habitat, l’envoi en esclavage dans les mines du Pérou, en Australie, sur l’île de Guam, l’exploitation de la population en Nouvelle-Calédonie, la pollution des lieux de vie. Evidemment la pensée colonialiste, le racisme contribuent largement à modifier les comportements. La christianisation détruit les croyances traditionnelles. Le traumatisme est intense encore aujourd’hui, c’est une source de défiance des Océaniens envers les Occidentaux. A l’occasion de la crise sanitaire du Covid, certaines populations se sont repliées sur leurs îles.
Laissons la parole à Christophe Sand : « C’est en explicitant les éléments centraux du traumatisme historique transgénérationnel, qui continue au XXIe siècle à affecter les sociétés insulaires, que pourra être assumée la totalité de cette histoire complexe. En mettant en perspective les traumas de la période coloniale, les peuples du Grand Océan peuvent s’en libérer, en « guérir ». Et façonner un futur apaisé… »

• Christophe Sand
Hécatombe océanienne, Histoire de la dépopulation du Pacifique et ses conséquences ( XVIe -XXe siècle)
Ed. Au vent des Îles, 2024

 

 

 

Des armes pour l’Espagne

Issu d’une thèse, l’ouvrage de Pierre Salmon analyse un angle mort de l’histoire de la Guerre d’Espagne, la question des livraisons d’armes depuis la France. Thème d’autant plus difficile à travailler qu’il s’inscrit aux marges de l’histoire officielle et qu’il croise à de nombreuses reprises les milieux interlopes – voire parfois maffieux – des relations des militants qui ont tenté de trouver des armes pour l’Espagne.
L’auteur souligne la difficulté de livrer des armes en raison des contingences géopolitiques internationales comme la non-intervention. La livraison d’armes est aussi variable en fonction des groupes défendant la république, l’armée régulière reçoit à partir d’octobre 1936 de l’armement en provenance de l’URSS – en échange de l’or de la banque d’Espagne.

 

Du côté des libertaires, la question de l’armement des miliciens est cruciale. Dans les premiers mois, la possibilité de faire passer des armes est relativement aisée, ce sont davantage les filières permettant de les acquérir qui sont difficiles à trouver. En septembre 1936, le gouvernement Blum a choisi la non-intervention, il a cependant laissé la possibilité d’acheminer des armes en Espagne. Pierre Salmon montre comment les libertaires et quelques fois les socialistes de la tendance pivertiste tentent de les transmettre. Pour les analyser, l’auteur a eu recours aux archives des saisies qui ont pu être effectuées à la frontière pyrénéenne, les douaniers et les forces de police n’acceptant pas les consignes orales du gouvernement Blum. Il a également abondamment utilisé les archives de la CNT pour expliquer quels militants ont pu participer à cette aide. Les résultats de son enquête donnent une image impressionniste, mais très réaliste des livraisons clandestines.

Les anecdotes fourmillent. À l’image de José Cervera, un plongeur et garçon de course, arrêté par la douane en mars 1937, avec une caisse contenant notamment 4 000 cartouches. L’enquête remonte vite jusqu’à un autre militant libertaire Lucien Casier, qui a déjà été suspecté par les douaniers d’avoir l’année précédente fait passer des armes en Espagne. Par ailleurs, elle explique que Paul Jouhaux, le fils de Léon Jouhaux, joue sur ses relations dans les milieux aux marges de la société pour obtenir des aides financières et trouver des armes. Jules Chazoff puis Pierre Odéon et Louis Lecoin en France et Lucien Tronchet en Suisse, par leur contact avec les responsables de la CNT, ont un rôle important tant dans l’achat de matériel que dans le passage de matériel militaire.
Sans pouvoir donner de données chiffrées, Pierre Salmon permet d’accéder à des informations originales qui offrent un tableau passionnant de cet aspect peu connu de la révolution espagnole.

Sylvain Boulouque

Pierre Salmon
Un antifascisme de combat
Armer l’Espagne révolutionnaire

Pierre Salmon
Éditions du Détour, 2024, 254, p. 21 €

 

 

 

 

Barcelone 1936, un monde nouveau est-il possible ?



C’est l’enthousiasme populaire mais faut-il défendre la Révolution ? Y compris les armes à la main ? Les anarchistes ont su se mobiliser, se sacrifier pour cette cause. Roberto Martinez Catalan s’appuie sur l’histoire de la colonne Durruti pour montrer les enjeux, les embûches, voire les crimes durant cette guerre. Oui, Qui a assassiné Buenaventura Durruti ? Comment concilier les principes révolutionnaires et la guerre contre le fascisme ? Quel idéal anarchiste construire dans une période de lutte ? Makhno s’est posé les mêmes questions et Durruti a lu Makhno, cela se ressent dans plusieurs de ses déclarations.

 

 

 

Roberto Martinez Catalan reprend les faits et les raisonnements dans son livre Destination Saragosse, Chronique de la Colonne Durruti publié aux éditions Le Coquelicot en 2024. « A travers un tableau multiforme de l’anarchisme espagnol pendant la Guerre civile, ce travail tente d’éclairer un peu l’organisation, le fonctionnement et l’évolution de la Colonne Durruti ainsi que des milices libertaires en général de leur création à leur intégration dans l’Armée populaire de la République. » Pourquoi cette colonne ? Elle est la première qui se forme à Barcelone et servit de modèle. Elle est commandée par une des personnalités les plus connues du mouvement libertaire. Elle visait la libération de Saragosse, important rempart anarchiste contre le fascisme.
Mais avant de reprendre les faits, Roberto Martinez Catalan analyse, sur les cinq ans précédant la guerre, les débats des mouvements insurrectionnels, le rapport à la discipline, les organismes destinés à protéger la CNT. Il insiste sur le groupe Los Solidarios rebaptisé Nosotros pendant la République.
Autant d’autres questions. Comment sont désignés les chefs militaires ? Peut-on s’appuyer sur la plateforme d’Archinov ? Que faire pour préserver la Révolution ? Faut-il une armée permanente ? Qui décide ? L’auteur pose les enjeux et expose les arguments des uns et des autres. Il y a un vrai problème de préparation. Faut-il une guerilla ou une organisation militaire ? Ces questions ont du sens qui va encore s’affirmer avec le putsch de Franco.

Durrruti, une figure du mouvement anarchiste
Durruti émerge, c’est une figure, il veut partir pour le front d’Aragon, d’où le titre de l’ouvrage : Destination Sarragosse, dès le 24 juillet 1936. Vous retrouverez les faits, la composition de la Colonne, mais aussi le manque de matériel, d’organisation, d’expérience militaire, les relations entre les colonnes de différentes sensibilités notamment du POUM. C’est aussi une chronique du quotidien de ces femmes et de ces hommes qui croient en la Révolution mais dont le gouvernement se méfie. Les communistes via Moscou pèsent sur les décisions. La CNT, la FAI ont-elles une stratégie ? Il ne semble pas. Tout évolue si vite. Le front progresse, les démocraties occidentales sont pitoyables d’aveuglements. L’arrière ne suit pas. Cela me fait penser à un livre que j’ai présenté dans l’émission Au fil des pages sur Radio libertaire. Une journaliste américaine décrivait le climat de l’avant-guerre et la montée du fascisme en Europe. Les pages consacrées à l’Espagne reprennent les éléments exposés par Roberto Martinez Catalan (Virginia Cowles, Au-devant des ennuis, Ed. Calmann Lévy, 2023).
Durruti critique cet arrière, demande du ravitaillement, des armes, des munitions. Il invite à comparer la discipline du front avec les comportements de l’arrière. Il reçoit l’ordre de se déplacer à Madrid, malgré ses protestations. Ne voudrait-on pas réduire son influence, le désamorcer ? Sur place, il n’a de réelle autorité que sur la moitié des 6 000 combattants. Un coup de fusil partira mettant fin à cette vie étonnante même si le mythe perdure. Durruti était apprécié de ses troupes parce qu’il vivait avec et comme elles.
La troisième partie de l’ouvrage porte sur l’organisation de la Colonne en centuries, décuries, la nécessité d’harmoniser les exigences de la guerre et les principes révolutionnaires. La militarisation des colonnes anarchistes et des milices entraîne une banalisation de la Révolution. Les anarchistes se méfient avec raison des communistes qu’ils accusent d’avoir tué Durruti. Faut-il mettre fin à la collaboration avec le Gouvernement de Juan Negrin et reprendre le chemin de la Révolution ? Le front d’Aragon est abandonné par ce même gouvernement. Les journées de Barcelone début mai 1937 traduisent la violence à l’égard des anarchistes sans réelle ligne politique même si Jaime Bailus tente en 1938 de donner une base de réflexion, Hacia une nueva revolucion, « document qui, au-delà de sa beauté littéraire, excelle par la lucidité de ses prises de position ». La suite du livre de Roberto Martinez Catalan rejoint l’Histoire. « Le meilleur hommage à la mémoire […] de tous ceux, sincères révolutionnaires qui créèrent la Colonne Durruti, et en particulier à son chef, consiste à donner à connaître les évènements qu’ils vécurent, leurs certitudes et surtout leurs erreurs. C’est ainsi qu’on pourra éviter de retomber dans les mêmes erreurs. »
J’ajouterai que ce livre à l’iconographie, aux notes et références très riches, rentre dans cette démarche passionnante de la micro-histoire, c’est-à-dire s’appuyer sur un fait, un groupe, une période pour analyser et comprendre un temps plus global.

 

 

 

par Francis PIAN

• Roberto Martinez Catalan
Destination Saragosse
Chronique de la Colonne Durruti

Ed. Le Coquelicot, 2024

 

 

 

 

La Commune croquée au gré des rues

 


En couverture, une barricade, rue de Tourtille dans le 20e arrondissement de Paris, le 18 mars 1871, la Commune de Paris commence son épopée. Allez-y aujourd’hui, la rue existe toujours, les lieux peuvent se charger d’émotions pour qui sait les ressentir. Au cours du siège de Paris de 1870 puis de la Commune en 1871, le dessinateur Albert Robida va réaliser de nombreux dessins, 177, de la vie des parisiennes et des parisiens pendant cette «
Année terrible » pour reprendre le titre du recueil de poèmes de Victor Hugo. Représentations diverses de ce quotidien tragique, combats, queues devant les magasins, constructions de barricades…

 

Notre ami Gérald Dittmar en a choisi 41 dessinés durant la Commune en y adjoignant le journal que Robida a rédigé durant ces évènements. Oui, comme il l’écrit dans son introduction, « ces dessins constituent un témoignage exceptionnel sur la Commune et nous donnent un autre regard sur ces journées dramatiques. » je le souligne souvent, les textes des témoins ont une force, une densité que les travaux des historiens ne peuvent pas restituer. L’approche est d’autant plus intéressante qu’Albert Robida n’est pas un militant. Il est républicain, pacifiste et relativement neutre. Pourtant c’est l’intérêt de son journal, il est épouvanté par le massacre des Parisiennes, des Parisiens, l’odeur des charniers, l’attitude des troupes versaillaises. Le lecteur pourrait retrouver les esquisses de Manet au cours de ces journées, La Barricade notamment.

Au cœur de l’évènement
Dans ce livre,
Albert Robida : Paris pendant la Commune de 1871, Gérald Dittmar introduit les propos et esquisses par une biographie synthétique du dessinateur et un bref historique de la Commune de Paris, ce qui permet au lecteur peu averti de se repérer dans la succession des 72 journées de la Commune. Ces faits seront illustrés par des extraits d’ouvrages de communards tels qu’Arnould, Vallès ou de témoins comme Lissagaray, Victor Hugo. Dans le journal de Robida, le lecteur est emporté par les évènements, l’effervescence de la rue, des habitants est magnifiquement rendue le 4 septembre, chute de l’Empire et émergence relative de la République. Ça bouillonne et vous êtes avec Félix Pyat, Gustave Flourens à Belleville. Le siège, le froid, la faim. Le 18 mars à Montmartre. Et puis « bien pittoresques les grandes barricades des boulevards extérieurs. Canons aux embrasures en pavés, les tambours entassés au milieu, les fusils en faisceaux avec pains embrochés aux baïonnettes. » Vous suivez les combats de Courbevoie, d’Asnières, de Clamart-Chatillon, ceux de Moulineaux, il est bien informé. « Gardes nationaux battus toujours mais non découragés. » Les journaux se multiplient. Et puis, la Semaine sanglante, le 28 mai, la déroute, les fusils, les uniformes, les munitions, tout est abandonné mais on arrête, on fusille. A Lobau, derrière l’Hôtel de ville, c’est la mort aussitôt. A Versailles, c’est une parodie de jugement et la mort, la déportation ou la prison. Des cadavres partout. « On dit qu’on a beaucoup fusillé aux Buttes-Chaumont. »

Le dernier combat
Et puis les dessins, des gardes nationaux qui se parlent tranquillement. Des barricades, le fortin du Moulin-Saquet à Vitry. Les cantinières. La rue des rosiers. Une retraite aux flambeaux à Belleville. Les destructions, œuvre des versaillais, sont rendues par des croquis éloquents, rue de la Roquette, le temple protestant rue Saint Antoine, Boulevard Beaumarchais, la colonne de juillet place de la Bastille, criblée d’impacts. Et les fusils entassés tout comme les cadavres. Nous retrouvons la rue de Tourtille dans le dernier combat. «
Albert Robida a produit avec ses dessins une chronique imagée de la Commune qui constitue une représentation de cet évènement et dont on peut dire, assurément, que cette représentation de la Commune est unique par la richesse de ses scènes et leurs variétés. »

• Gérald Dittmar
Albert Robida : Paris pendant la Commune de 1871
Ed. Dittmar, 2024

 

Combo DVD Bleuray:

Dessin de la semaine

Les fleurs du mâle

Ni dieu ni maître,mieux d'être

                                            (Jacques Prevert)

Communiqué de l'UCL

Intersectionnalité : Pour des luttes écologiques antiracistes et populaires

 

Les quartiers populaires sont à l’intersection des dominations et subissent plus fortement les conséquences de la pollution et du réchauffement climatique. Pourtant, les liens entre mouvement écologiste et luttes de ces quartiers peinent encore à se créer malgré des premiers pas encourageants.

 

Les quartiers populaires sont au croisement de diverses formes de domination. L’État raciste y déploie des mécanismes coloniaux qui rendent la vie des habitant·es extrêmement difficile  : réduction des services publics, autoritarisme accru au détriment de l’éducation, exclusion ­géographique avec moins de transports en commun, violences ­policières…À cela s’ajoute une qualité de vie fortement impactée par les crises environnementales. Les quartiers populaires sont recouverts de béton ce qui renforce les îlots de chaleurs. À l’inverse les quartiers plus riches des métropoles accumulent les espaces verts (privés ou publics) qui permettent un rafraîchissement lors des canicules. [1]

 

Les quartiers populaires sont construits dans des zones non prisées des villes, souvent à proximité des autoroutes ou des sites industriels, les exposant ainsi à une pollution importante. Par exemple, à Lyon, les écoles classées en REP/REP+ (Réseau d’éducation prioritaire) sont trois fois plus nombreuses dans les zones fortement polluées par le dioxyde d’azote (NO2) (dépassant les 40 μg/m³, la valeur limite réglementaire annuelle) [2]

 

Des luttes en parallèle…

 

Pour faire face à ces injustices sociales et écologiques, les habitant·es des quartiers populaires s’organisent à travers des collectifs de lutte, des syndicats de ­personnes concernées, etc., pour défendre : le droit d’accès à la piscine avec le maillot couvrant, ­l’amélioration les menus des ­écoles… En parallèle, existent les luttes contre les grands projets inutiles et pour la réappropriation des terres : les mégas bassines, No TAV… Mais, ces deux sphères de lutte peinent à se rencontrer et plusieurs éléments peuvent ­l’expliquer.

 

Premièrement, comme on a pu l’observer après l’assassinat de Nahel, quand un mouvement émanant des quartiers populaires prend forme, on note une certaine méfiance et un temps ­d’observation s’applique par manque de (re)connaissance de ces luttes. Deuxièmement, les modes d’action sont différents. Par exemple, une action tenue secrète ou illégale entraîne une sélection des potentielles participant·es. Nous vivons dans un État raciste et autoritaire, qui fait que les risques encourus par les personnes ne sont pas les mêmes selon leur racisation. Ainsi, vouloir faire de la désobéissance civile sans réelle stratégie autre que la massification, implique, forcément, un filtre sur les participant·es. De plus, les habitant·es de quartiers populaires subissent du racisme à outrance, un racisme qui les exclue tous les jours, les faisant sentir  pas chez eux », donc comment on peut s’attendre à une quelconque défense des terres dans un territoire qui n’est pas « notre ». Enfin, le peu d’espaces communs existant nous cloisonne, ce qui entrave notre solidarité de classe. Redynamiser les Unions locales des syndicats, les bourses du travail, les maisons des habitant·es ou encore créer des maisons de l’écologie populaire (tel que Verdragon) [3] sont des pistes pour recréer des espaces communs de solidarité et de lutte.

 

… qui gagneraient à s’entraider

 

Cependant, quelques liens existent et mériteraient d’être ren­forcés. En 2020, il s’est déroulé une manifestation conjointement organisée par le Comité Adama et Alternatiba sous le slogan commun  : «  Génération Adama, Génération climat  : on veut respirer  ». Cette solidarité face à la répression est importante, il est ainsi nécessaire de construire des liens pour lutter ensemble et faire preuve d’une réelle entraide de classe. Cela ne pourra avoir lieu sans une remise en question profonde des dynamiques racistes présentes au sein des organisations majoritairement blanches.

 

Oum et Léo (UCL Grenoble)

 

Pour aller plus loin :

 

  1. Fatima Ouassak, Pour une écologie pirate, La Découverte, 198 pages, 17 euros.

 

 

 

Retour « au taf », les syndicalistes autogestionnaires et libertaires !

 

Le mouvement social de 2023 pour la défense des retraites a montré à quel point le syndicalisme de lutte restait un acteur incontournable de la lutte des classes... mais aussi à quel point il était affaibli. Plusieurs questions engagent son avenir : où en est l’axe CGT-FSU-Solidaires ? l’impératif écologique ? l’égalité femmes-hommes ? le rôle des minorités sexuelles ou racisées en son sein ? Les syndicalistes libertaires et autogestionnaires proposent d’en débattre publiquement.

 

Après le succès de la première édition à Montreuil en 2022, on remet ça dans la capitale des Gaules. Ce sera à la Maison des Italiens, 82 rue du Dauphiné, à Lyon 3e. Réservez votre week-end !

 


 

AU PROGRAMME
(les intervenant·es seront bientôt précisé·es) :

 

Samedi 25 mai

 

  • Ouverture à 13h30

  • 13h45-14h : Prises de parole inaugurales

  • 14h-15h30 : table ronde n°1 : Syndicalisation des secteurs féminisés

  • 15h30-16h30 : table ronde n°2 : Quel syndicalisme pour les luttes trans

  • 16h30-17h : pause

  • 17h-18h30 : table ronde n°3 : Construction et unification du syndicalisme de lutte

  • Soirée festive

 

Dimanche 26 mai

 

  • Ouverture à 10h

  • 10h-12h : temps interne UCL

  • 12h-13h : pause repas

  • 13h-14h : table ronde n°4 : Pratiques syndicales pour la sociabilité ouvrière

  • 14h-15h : table ronde n°5 : L’outil syndical pour un écologisme de classe

 


 

Communiqué FA:

Manifestation régionale antifasciste à Saint-Brieuc, le 21/04ANTIFASCISTES PARCE QU’ANARCHISTES !

 

Face à l’emprise croissante de l’extrême droite depuis 40 ans, et à ses manifestations agressives en Bretagne depuis quelques années, nous partageons un constat d’urgence à répliquer avec nombre d’organisations politiques et d’individus. La création d’un « Front commun antifasciste » [https://frontcommun22.wordpress.com/], très large, en témoigne. Et si nous assurons de notre soutien sans faille toutes celles et ceux qui luttent contre le fascisme ou en sont directement les cibles (personnes racisées, handicapées, LGBTQI+, femmes, militant.e.s…), nous pensons que la riposte doit être radicale (qui va à la racine du problème), c’est-à-dire libertaire.

Instrumentalisant la perspective d’une prise de pouvoir fasciste, parfait épouvantail depuis les années Mitterrand, les partis dits « de gouvernement » naviguent eux-mêmes entre autoritarisme du capital et processus de fascisation. Depuis longtemps, profitant des confusions idéologiques et d’une police largement acquise à sa cause, l’extrême droite a troqué la chemise brune pour le costard-cravate, et actuellement, c’est le macronisme qui paye le tailleur. Nous considérons donc que l’arrivée probable du RN au gouvernement ne fera qu’« officialiser » un rapport de force déjà présent. Les lois séparatisme et immigration, l’opération Wuambushu, le contrôle des vêtements des écoliers et plus particulièrement des écolières (que ce soit l’interdiction de certains ou l’obligation d’autres), le SNU, le simulacre de dialogue social ou encore la militarisation de la police en sont des preuves.

Face à une trajectoire présentée comme inéluctable par les médias à la botte, nous ne compterons ni sur un prétendu « barrage » aux prochaines élections, qui chaque fois nourrit l’illusion démocratique sans transformer la situation, ni sur l’attente du « grand soir », qui immobilise devant l’ampleur d’un programme jamais appliqué.Hier comme aujourd’hui, le nationalisme reste la base mortifère du fascisme. C’est une nécessité vitale de le combattre tant l’horizon est bouché. Contrairement à nos ennemis idéologiques, nous revendiquons clairement notre chemin politique : entraide, liberté, égalité, fédéralisme, internationalisme.

Pour sortir de l’impuissance, nous pensons qu’il faut concrètement promouvoir nos pratiques, s’impliquer dans les espaces existants et construire de nouvelles initiatives d’émancipation qui puissent inscrire notre force dans le temps, par exemple :
• des opérations d’entraide matérielle pour enrayer par nous-mêmes la misère et l’exploitation, notamment dans l’exil (caisses de solidarité, cantines, squats…) ;
• des actions de lutte sociale (dans et hors les syndicats) pour conquérir notre autonomie, en socialisant les moyens de production et en se débarrassant de ceux qui sont délétères ;
• des lieux de diffusion et de développement de la culture et des pratiques anarchistes, pour dissiper les confusions politiques (bibliothèques, lieux de spectacle autogérés, pédagogie libertaire, épiceries autogérées…).

Ce combat contre le fascisme est global et se contenter d’une lutte locale n’aurait pas de sens. Il serait vain d’espérer des avancées ici si de l’autre côté de la frontière on exploite encore notre classe sociale. C’est pourquoi nous appelons aussi à soutenir politiquement et matériellement nos camarades qui se battent à travers le monde contre les États autoritaires (que ce soit au Moyen-Orient, en Inde, en Hongrie, en Argentine, au Soudan…), ainsi qu’à bloquer, saboter les entreprises et institutions impérialistes sur notre propre territoire (arsenal, banques, laboratoire, entreprise coloniale…).
La montée des autoritarismes est un phénomène mondial, par conséquent, il est urgent de renforcer le fédéralisme libertaire en Bretagne et dans le monde. Nous ne voulons pas de patrie ! Nous proposons donc aux orgas, collectifs et individus qui partageraient ces points de vue libertaires de se retrouver dans un cortège rouge et noir lors de la manif antifasciste régionale le 21/04 à Saint-Brieuc, en toute diversité organisationnelle et tactique. Ce sera l’occasion d’exprimer notre solidarité contre les agressions néo-fascistes, de tenir la rue et de rendre visible notre détermination à vaincre, à court, moyen et long termes, la flambée de l’extrême droite qu’attise le système capitaliste.

Nous voulons vivre libres ! Agissons pour développer l’anarchie, et c’est à la racine que l’on détruira le fascisme !

Des groupes de la Fédération Anarchiste en Bretagne

 

 

 

 

MANIFESTATION CONTRE L’A69 ET SON MONDE, LE 21 AVRIL À TOULOUSE

Le Comité Toulousain contre l’A69, qui réunit associations, collectifs, syndicats, partis politiques, scientifiques, citoyen.ne.s de tout le territoire, vous informe de la tenue d’une manifestation le Dimanche 21 avril 2024 à 14 heures, en haut des allées Jean-Jaurès, à Toulouse.

 

L’autoroute A69, contrairement aux annonces, n’est pas construite.
Le chantier a 1 an de retard.
Rien n’est joué.

Nous qui défendons le Vivant, debout contre ce projet d’auto- route, avec le collectif La Voie Est Libre, les Écureuil.le.s du G.N.S.A. et d’ailleurs, les agriculteur.ices de la Confédération Paysanne, les syndicalistes de la FSU, de la CGT et de l’Union syndicale Solidaires, avec celles et ceux qui défendent la santé contre les usines à bitume, avec celles et ceux qui gardent les Zones à Défendre, avec près de 2000 scientifiques, et forts de nos soutiens nationaux et internationaux, nous nous opposons avec détermination à la construction de ce projet, de ses usines à bitume et des futures entreprises de logistique qui le jalonnent.

Contrairement à ce qu’affirme Michel Vilbois, le préfet du Tarn, la mobilisation n’est pas le fait de quelques centaines de personnes et ne s’essouffle pas. La manifestation du 21 avril entend le prouver.

Au-delà des évènements militants qui rassemblent toujours plus de monde, 61% des habitant.es du Tarn et de la Haute- Garonne s’opposent au projet ainsi que plus de 300 élu.es du Tarn et de la Haute-Garonne ; 200 scientifiques de la Région, relayés par plus de 2000 collègues nationaux ont expliqué les raisons de leur rejet du projet ; plus de 500 soignants alertent sur les questions de santé ; 33 urbanistes dénoncent les effets déstructurants de cette construction pour le territoire.
La légitimité des opposants est renforcée par l’Autorité Environnementale et par le Conseil National de Protection de la Nature, deux institutions clé ayant formulé dès le départ des avis négatifs et souligné les impacts irréversibles de ce projet.

Cette infrastructure autoroutière va à l’encontre de tous les engagements pris pour faire face au réchauffement climatique, à l’érosion de la biodiversité, à la lutte contre les inégalités, et accélère au contraire ces désastres. Ce projet fait fi des nombreuses alertes scientifiques, des savoirs établis et du vécu de populations plus préoccupées par les sécheresses, la désertification de leurs milieux familiers, la diminution des terres agricoles, la pollution par le bitume, que par le gain de quelques minutes entre Castres et Toulouse sur une autoroute privée, payante et chère.

Nous nous y opposons car les intérêts liés du concessionnaire Atosca, de l’entreprise Pierre Fabre, du monde du béton et du bitume, sont chèrement défendus par l’État et son appareil policier et judiciaire, au mépris des règles démocratiques, des droits humains élémentaires, et de la protection de la biodiversité.

Pour défendre ce projet injuste, inutile et écocidaire, il ne reste plus à ses promoteurs et ses alliés que le passage en force, au mépris des réglementations, et l’usage de la violence répressive. Nous nous allions à la mésange bleue qui rap- pelle à la préfecture l’illégalité de ses ordres et qui a fait reculer les machines d’Atosca à Saix, les blindés de la gendarmerie et tout l’arsenal guerrier déployé pour empêcher des Écureuil.les et leurs allié.es au sol de sauver du désastre des arbres et des habitats d’espèces menacées.

Nous demandons :
- d’obtenir un moratoire sur les travaux de l’A69 jusqu’à ce qu’une contre-expertise socio-économique soit faite et qu’il y ait jugement sur le fond ;
- un débat démocratique pour faire de ce territoire un lieu habité où la vie se régénère au lieu de s’éteindre au profit de la logistique autoroutière;
- la reconnaissance des lanceurs d’alerte et des défenseur.ses du vivant, ici et ailleurs, et l’arrêt de leur répression ;
- que la trajectoire régionale environnementale se fasse au profit de la protection du vivant, et non par la « compensation », concept illusoire et toxique.

 

 

 

La manifestation à Toulouse constitue le 2ème moment d’un week-end d’actions.

Le 1er prendra place le samedi 20, à l’Union, avenue de Bayonne, Halle couverte, avec de nombreux stands et activités autour des mobilités douces et pour un futur désirable.

Le CycloRetour dont les cyclistes seront partis de Castres le 13 avril 2024 fêteront ainsi leur avant-dernière étape. Ils rejoindront ensuite, le dimanche, en une arrivée triomphale, la manifestation.


La manifestation du 21 Avril est inclusive et « multimodale », avec la présence de nombreux vélos et autres véhicules non- polluants. Des groupes de musique, de l’art de rue, des ART’ivistes l’animeront afin de souligner le caractère inédit, dans la capitale régionale, de ces revendications.

Le comité Toulousain contre l’A69, vous invite à informer les citoyen.ne.s en amont et vous convie également à couvrir la manifestation qui sera déclarée en préfecture.

Pour toutes questions, renseignements: stopa69-toulouse@pro- ton.me
Ou, par téléphone : Jean : 06 34 37 71 87
Geneviève : 06 08 94 54 34
Is : 06 60 99 45 29
Arthur : 06 52 81 62 81

LISTE DES SOUTIENS :

La Voie Est Libre, le Groupe National de Surveillance des Arbres, Une Autre Voie, Alternative Ferroviaire, Extinction Rébellion, Greenpeace, Scientifiques en Rébellion, L’ATelier d’ÉCOlogie POLitique, l’Union syndicale Solidaires, La Fédération Syndicale Unitaire, La Confédéra- tion Générale du Travail, La Confédération Paysanne, La France In- soumise, Europe Écologie Les Verts, Nouveau Parti Anticapitaliste, Révolution Permanente, Attac (Association pour la Taxation des Transactions financières et pour l’Action Citoyenne), Stop gravières, Les amis de la Terre, Collectif Non à la jonction Est, Les collectifs sans bitume,, Pink Medics, Youth4Climate...

 



 

Communiqué CNTSO:

Livreur-euses : Contre l’exploitation en roue libre !

 

Pour la 2ème fois, des élections professionnelles sont organisées en mai 2024, pour élire les représentant·es des livreur·euses à l’A.R.P.E. La CNT-SO a présenté sa candidature, pour faire avancer la reconnaissance totale de nos droits salariaux, sociaux et syndicaux. 

 

Pour ce scrutin nous avons prévu d’unir nos forces avec SUD Livreurs (fédération SUD Commerce), organisation actuellement représentative, avec qui nous partageons depuis plusieurs années, de nombreux combats auprès des livreur-euses : actions juridiques communes  (dont contre Frichti aux Prud’hommes et Deliveroo au pénal), mobilisations (dont le mouvement des livreurs sans-papiers pour la régularisation). 

 

Pour l’instant nos organisations ont été écartées du scrutin par l’A.R.P.E et nous avons déposé des recours devant la justice (délibéré le 06 mai) pour faire invalider cette décision scandaleuse  ! On ne lâchera rien pour faire entendre la voix des livreur-euses avec une alternative syndicale indépendante des plateformes et de l’Etat pour la reconnaissance de nos droits !  

 

 

 

 

 

Salarié-es intérimaires et permanents, devenez élu-es au CSE Adecco France avec la CNT-SO et faisons avancer nos droits en construisant un rapport de force !

 

Le 1er tour des élections professionnelles chez Adecco France aura lieu en 2024.

 

Ces élections seront l’occasion pour les salariés intérimaires et permanents de choisir les élus qui les représenteront au CSE (Comité social et économique) pendant 4 ans.

 

Depuis le 13 Mars, la CNT-SO figure parmi les neuf syndicats prenant part aux négociations pour mettre en place ces élections professionnelles.

 

En rejoignant les listes CNT-SO, vous revendiquez plus de droits, vous construisez un rapport de force favorable !

 

 

 

SALARIÉ-ES, PAS ESCLAVES

Samedi 6 avril avait lieu un nouveau rassemblement de soutien aux salarié-es d’ ONELA en grève depuis le premier février. Nous étions 40 à 50 devant les locaux de la rue Emile Lepeu pour manifester notre solidarité.
C’est quoi ONELA ? Une entreprise spécialisée dans « l’aide à domicile » pour personnes handicapées ou âgées. Le service d’astreinte de la rue Emile Lepeu (75011) gère les absences et est chargé de trouver des auxiliaires de vie pour pallier ces absences. Cette équipe se compose de de 15 salarié-es dont 7 sont en grève illimitée, les autres se joignant au mouvement par des arrêts de travail, certains jours.

 

La cellule d’astreinte d’ONELA (succursale du groupe COLISSÉ INTERNATIONAL) gère 70 établissements à travers tout l’Hexagone. Soit 15 personnes entassées dans un espace de 65 m² insalubre, avec des journées s’étalant de 7h à 22h sur des plages horaires de 10 heures consécutives, dans des conditions plus que limite (installé-es sur des chaises pliantes avec du matériel électrique obsolète et dangereux.
Lorsque les agences d’ONELA sont fermées, c’est cette petite équipe qui prend les appels des personnes handicapées ou âgées de tout le pays : jusqu’à 2500 coups de téléphone certains week-ends.
Précisons que cette équipe d’astreinte est composée d’étudiant-es, très majoritairement femmes racisées ( familles mono-parentales) et employées sous contrats précaires (avec salaires ridiculement bas ne correspondant pas à la somme de travail exigée par l’employeur).

La devise de l’entreprise : « ONELA, être bien chez soi ». Les salarié-es répondent : « ONELA, être mal au travail ».

D’où le mouvement de grève et ses revendications notamment :
- toucher 17 euros nets de l’heure.
- majoration de 100 % les dimanches et jours fériés et de 50 % les samedis.
- obtention de tickets-restaurant d’un montant minimum de 10 euros.
- paiement intégral du travail dissimulé du 01/01/2019 au 01/07 /2023.

 

À ces demandes, après huit réunions de conciliation, la Direction s’est fendue d’une « superbe » proposition : augmentation des salaires de… 13 centimes d’euros (bruts bien sûr). Les grévistes ont pris ça pour ce que c’était : un affront et du mépris de classe. Autant dire que leur mouvement se poursuit. Et autant dire aussi que soutiens physique et financier sont nécessaires. Pour cela, soyons présents à leur prochain rassemblement devant le siège d’ONELA, vendredi 12 avril à 11h00, 35 rue de Paris à Boulogne-Billancourt.

Ramón Pino
Groupe Salvador Seguí

 

 

 

 

Le lycée autogéré de Paris : chronique d’un démantèlement annoncé

 

(Extrait de texte distribué à la journée de rencontres de l’émancipation scolaire à Paris, le 16 mars 2024)

 

« Récemment, vendredi 24 février, à la veille des vacances, le DASEN (directeur académique des services de l’éducation nationale) se rend au lycée autogéré de Paris, pour faire état à une assemblée, composée d’élèves et de professeurs, des décisions prises par la hiérarchie. Ces décisions font suite aux « préconisations » d’une enquête administrative […].
Un peu avant… en juin 2022, le rectorat refuse de renouveler la convention qui encadrait le fonctionnement dérogatoire du LAP depuis 2011, en précisant que des principes du fonctionnement doivent être rediscutés […]. Il semble bien que ce soient des éléments du fonctionnement du lycée qui posent problème à la hiérarchie, mais à ce stade, elle ne l’assume pas frontalement […]. Ainsi sera diligentée une enquête administrative. Soixante-dix auditions se tiennent au rectorat et au ministère sans qu’aucun inspecteur ne juge nécessaire d’observer le fonctionnement du LAP […]. Ses conclusions se veulent sans appel et ont pour but d’enterrer définitivement le projet du lycée autogéré. En comparaison, une enquête administrative sur le lycée privé Stanislas, n’a entraîné aucune remise en cause structurelle. Un acte de contrition permettrait-il, à lui seul, de tourner la page […] ?
Même si le rectorat affirme qu’une suspension n’est pas une sanction, qu’en est-il pour les suspendus ? Pour les quatre professeurs suspendus à la rentrée de février, cela signifie que leurs projets, tout ce qui est en cours, et plus largement tout ce qui constitue leur travail s’interrompt brutalement. Ils ont désormais l’interdiction de se rendre au lycée, de rentrer en contact avec leurs collègues et élèves […]. Pour la plupart, il leur serait reproché une « méconnaissance du devoir d’obéissance », en somme de ne pas avoir dénoncé à la proviseure de tutelle des événements tenant de la vie politique et sociale du lycée. Il leur serait aussi reproché leur présence lors d’une occupation de l’établissement par des élèves […]. Il s’agit bien de la fin possible d’un établissement important et symbolique, d’un lycée qui sauve de nombreuses personnes qui ont eu de très mauvaises expériences au sein d’établissements traditionnels. La fin d’un lieu émancipateur, autogéré, existant depuis 42 ans. Nous comité de soutien du lycée autogéré et de son équipe, défendons l’existence de cette institution et de tous ceux qui la font vivre, et nous opposons à toutes ces attaques qui ont lieu à 360 degrés. »

Des représentant.e.s du LAP seront présents au colloque Education autogestionnaire, coopérative et libertaire organisé par le groupe Commune de Paris à l’AERI de Montreuil, 57, rue Etienne Marcel, le 27 avril 2024.

Synthèse réalisée par Hugues, gr. Commune de Paris
Réunion du comité de soutien, tous les lundis soir à 19 h, Bourse du travail de Paris, 3 rue du Château d’eau.
Pour tout contact : vivelelap@riseup.net et sur lap.espivblogs.net

 

 

 

https://www.youtube.com/watch?v=3ymjnILRclQ&embeds_referring_euri=https%3A%2

 

Presse:

L'empaillé:

 

Bonjour à tous et toutes, 

Il nous reste jusqu’au 31 décembre à minuit pour réunir une somme 
suffisante afin de financer au mieux l’agrandissement de la diffusion de 
l’Empaillé à une dizaine de départements. Jusqu’ici, nous avons récolté plus de 10 000 euros dans la cagnotte mise en ligne. Il nous en faut au 
moins le double dans les trois semaines qui viennent, alors c’est le 
moment de mobiliser vos porte-feuilles, ceux de votre entourage, de 
votre association, syndicat ou organisation politique : chaque euro 
compte pour nous permettre des envois du premier numéro gratuitement à des milliers d’associations, bibliothèques, centres sociaux, bars ou librairies pour nous faire connaître ; pour envoyer des colleurs et colleuses d’affiches de Bordeaux à Limoges afin d’annoncer la nouvelle ; pour lancer une commande de centaines de présentoirs en bois qui trôneront dans des centaines de nouveaux lieux de notre réseau d’auto-diffusion ; pour régler l’addition à l’imprimeur du tirage porté à 40 000 exemplaires ; pour aider au financement d’une équipe élargie à cinq postes de salarié-es afin de faire vivre cette publication et relayer davantage les luttes et les combats de cette partie du pays. 
Comme d’habitude, de notre côté on lâchera rien et on est dans les 
starting-blocks pour lancer cette nouvelle formule de l’Empaillé. Alors 
merci d’avance de diffuser cet appel ; donnez ce que vous pouvez, 
abonnez-vous, réabonnez-vous et à très bientôt ! 
Hauts les cœurs ! 

L’équipe de l’Empaillé